Premier bar, première bière… 15 cm de hauteur, 0,5l, jaune ambrée… nom imprononçable. Je bois. Le verre est beau, moi aussi. Je suis dans un petit café qui pue le tabac et la bière: des jeunes , des moins jeunes, une dizaine de tables au total. Il y a un vrai poivrot au comptoir, tirant sur le pourpre, appuyé comme il se doit… l’oeil divinement glauque, entre une fin de communisme et un chômage de transition ultra capitaliste…Vient de s’asseoir une petite vieille… un litre, pas moins, mais une super casquette. Devant moi à une table, une presque vieille, mais pas si vieille qui sirote de la bière brune en tirant de longues bouffées de cigarettes, l’air triste, le regard slave… des heures de vol, des heures de bière, quelques cumulonimbus de fumées… Lou Reed chante en fond, je suis à Prague.
Le poivrot glisse vers la sortie, une table embordélisée à outrance est siglée en français d’un « réservé », on ne touche pas…!
Un litre de bière pus tard, le réserveur rentre, il s’assied… le patron lui sert immédiatement sa bière et son cendrier, la presque vieille attaque son deuxième litre, la nuit est tombée. Le réserveur a le regard fixé au dessus de sa cigarette, le niveau de sa bière descend sans qu’on ait l’impression qu’il la boive…. cependant….je ne sais pas décrypter les pensées Tchèques, mais le regard de cet homme me plonge dans une époque pas si lointaine où il y avait encore des regards ouvriers épuisés le soir après une journée de travail…. serait-ce l’âme slave ?
Trois jeunes blondes opulentes de partout rentrent bruyamment… Serais-je dans un claque ? le réserveur les ignore, la presque vieille cherche une cigarette, les jeunes à côté rient, la vieille qui a bu son litre part pisser, les opulentes vulgarisent, je peux les comprendre sans parler le Tchèque… je suis à Prague…