chroniques de la haine apaisée: 17


« Quand bien même ce chien vous aurait mordu, il ne fallait pas le tuer… et surtout pas comme vous l’avez fait. » leur dit la grosse dame

Il est vrai que les deux gamins s’étaient acharnés sur le pauvre canidé, il ne ressemblait plus vraiment  à un chien. Ils l’avaient frappé à coups de battes de base ball, il avait bien essayé de les mordre , mais leurs coups étaient précis et ils avaient donné l’impression, à ceux qui les avaient vus agir, qu’ils maîtrisaient avec efficacité l’art de tuer vite et bien.

« Alors pourquoi l’avez-vous tué ?

_Nous avons faim…  »

29-05-2010


Il eut été si facile d’avoir l’air d’un con devant mon bout de saucisson que j’aurais aimé me voir  face  à lui l’espace d’un instant…. mais j’en ai refusé l’image, comme je réfute le sens qu’on peut donner  à cette image… Je resterai stoïque et incertain.Le saucisson, amalgame de viande et de sang porcin… c’est bon. Le plus con n’est pas de manger du saucisson …. mais seul, face  à un saucisson, vous mesurez, l’espace d’un moment court, combien il doit être dur d’être moine en une abbaye cistercienne ….combien il doit être dur d’être prêcheur dans le désert, comme il doit être dur d’être femme dans certaines lointaines contrées montagneuses…. comme il est dur ce saucisson.

chroniques de la haine apaisée: 16


il avait beau se retourner dans son lit pour rechercher un sommeil qui s’éloignait de plus en plus au regard du jour qui se levait, il se leva donc, donc il se leva… Il était debout, face à sa fenêtre, le jour était  là, encore une fois…Il fit comme à son habitude, il alla se recoucher pour rechercher un sommeil qui ne pourrait plus venir, le jour étant là, sans soleil, plus grisé que gris. Une fois couché, il se retourna quelques fois, regarda la fenêtre, ferma les yeux, imagina une fenêtre puis les rouvrit…Encore debout, les yeux fermés, face à la fenêtre et puis le lit, encore une nuit… tout cela se répéta une éternité et puis une autre encore…. changer de sens pour se retourner pensa-t-il…

chroniques de la haine apaisée: 15


Elle était enfin là… attachée, liée, de ses pieds  à son ventre nu, la corde passant par sa nuque qu’elle courbait afin qu’elle ne puisse se dégager. Elle le regardait, violente, insoumise… Il s’en délectait, il la savait désormais sienne, à terre. Du sang coulait le long de ses lèvres, le lien remontait, avec une forte contrainte, ses deux bras dans son dos. Ainsi attachée, son cul s’en trouvait sublimé, c’était la seule partie de son corps qui présentait une visibilité et une accessibilité totale… il se préparait….Mais il fallait au préalable qu’il  apaise l’hémorragie provoquée par le sectionnement  de son sexe…. Elle avait encore la bouche fermée, il fallait qu’elle  crache le morceau d’une manière ou d’une autre…

chroniques de la haine apaisée: 14


Et puis les abeilles moururent toutes… il n’y eut plus de fruits. Les insectes qui mangeaient les fruits disparurent à leur tour, ainsi que les oiseaux qui mangeaient les insectes qui mangeaient les fruits. Comme il n’y avait plus de fruits, il n’y eut plus de graines, il n’y eut donc plus de plantes…. il y eut moins d’air, il y eut moins d’hommes, il n’y eut plus de vie…. je la regardai mourir, enfermée sous son verre retourné, il n’y aura plus de vie lui dis-je…

chroniques de la haine apaisée: 13


Et pourtant  il n’était pas grand, mais il avait tenu à le faire lui-même…. Il descendit donc l’escalier de sa petite maison, sous le regard attendri de ses parents. C’était la première fois qu’il partait ainsi seul, chasser. Il était équipé de son petit attirail de prédation que lui avait confectionné son père…. la chasse était désormais leur seul moyen de subsistance; à eux comme  à tous les survivants de la grande extermination, celle de la fin d’avant, celle qui avait conduit  la vie à presque totalement disparaître. Cela avait été le choix des nations, la planète étant exsangue, infertile, surpeuplée…. définitivement exploitée; les grands hommes de ce monde avaient tous appuyé sur le bouton ensemble , celui qui avait permis l’explosion finale, celle qui eût pu laisser une chance à  quelques-uns par un retour  légitime à la sélection naturelle…Les doses massives de radiations avaient provoqué des mutations, prévues et attendues… la vie devait continuer quelque soit la forme dans laquelle elle habitait. Il partit donc  à la chasse dans la ville, là où il y avait encore du gibier, essentiellement des bipèdes, difficile  à chasser mais goûteux avant tout. Il les piégeait avec un peu de nourriture qu’il plaçait sur un bout de soie, généralement ils se retrouvaient pris dans l’engluement de la soie et il n’avait plus qu’à les piquer. Ce soir-là il en ramena deux: une femelle à poils blonds et un mâle des montagnes. Il déposa les cocons sur la table, sa mère l’enlaça de ses huit pattes…en l’embrassant, les cocons bougeaient derrière eux…

chroniques de la haine apaisée: 12


Il se tordait de douleur, empoignant sa barre de lard ventral de ses dix doigts crochus et noueux. Durant un court instant il se pencha face  à terre, cherchant un souffle second, un de ceux qui vous permet de gagner  dix ou quinze secondes durant une fin de vie. C’est en relevant son visage vers cette porte d’un jaune éteint qu’il retrouva un faciès  moins contraint, crispé, violenté. Il sentait venir l’instant où ce serait fini, fin d’une douleur, fin d’un spasme, fin de sa faim toujours incontrôlée. Il y avait aussi cette lame, plantée juste dans son nombril… Il ne sentait pas la douleur , mais le lent écoulement de ses intestins vers le sol, écoulement chaud comme une  défécation ordinaire d’un lendemain de banquet. L’autre, celui qui avait tué souriait…. Vint l’instant où il aurait dû lâcher son dernier soupir, mais cet ultra mangeur, cet ogre construit à coup de petits sablés, de viandes en sauce et de fromages entiers se contenta d’un pet foireux pour dernière expiration…

chroniques de la haine apaisée: 11


Cela faisait longtemps que je me taisais, quelques jours tout au plus et vous me manquiez, vous… mon international réseau de lecteurs, mes millions de fanatiques… que dis-je mes milliards, sans compter les peuples extra-terrestres qui m’ont déjà sacralisé et qui ont élevé des statues à mon effigie… OUI parfaitement sur des planètes lointaines mon auguste Moi est divinisé et je tiens  à préciser que je ne touche pas de royalties ni de droit  à l’image… ils ont juste fait une image tri-dimensionnelle  de me mon onde subspatiale…. cela ressemble à une petite vaguelette, plus précisément une rondelette ondelette et ils l’ont imprimée avec une carte sidérale sur des petits paquets qu’ils vendent dans d’énormes hangars ressemblant beaucoup à nos supermarchés…. Cela me fait un peu peur, surtout depuis qu’ils ont débarqué dans mon jardin et qu’ils ont réquisitionné mon barbecue… Il sont là, derrière la fenêtre, je ne sais pas s’ils essaient de rentrer…. il y a visiblement une famille , ils ont l’air de vacanciers…. à l’heure du repas.

chroniques de la haine apaisée: 10


Ils se tenaient tous face à lui, équipés de leurs stylos et bloc-notes appropriés. Ils étaient  là, dans la phase ultime de l’observation… Lui, était un petit garçon de 7 ans, blond aux yeux noirs… Il était le dernier  cas observé et répertorié de déviance comportementale. Depuis dix ans déjà, grâce au progrès de la science et de la médecine ou plutôt de la médecine et de la science… Il n’y avait plus aucun cas de violence, de différence, d’exaltation artistique. Il n’y avait que des êtres en accord avec l’Idée, il n’y avait qu’une solution, qu’une question  à la fois et qu’une réponse possible…Une société sans remous, sans larmes, sans avenir imprévisible. Lui avait été repéré dans une école, ses parents morts très tôt  d’un regrettable accident que personne n’avait sincèrement regretté. Lui avait dit « grosse conne »  à sa maîtresse, lui avait frappé ses camarades, lui avait fait caca dans un couloir. Deux jours après, les plus grandes sommités scientifiques mondiales s’étaient rassemblées pour élucider son cas. Lui résistait  à toutes les molécules, Lui résistait  à toute forme d’imprégnation psychiatrique, Lui leur disait merde en souriant…. et tous étaient  face  à Lui sans comprendre… Dieu, dans son infini sagesse avait enfin envoyer son fils sur terre pour remettre en marche le processus vital….. Lui leur cracha  à la gueule et rota un coup.

%d blogueurs aiment cette page :