Il était face à moi depuis quelques instants, sans bouger. Il monopolisait l’espace, de par sa taille, de par le bruit qu’il prenait plaisir à laisser échapper de son corps… Son immobilité relative m’inquiétait, je l’avoue. Il me fixait de ses gros yeux; je n’aime pas qu’on me toise. Je décidai, à mon tour, d’opter pour un immobilisme certain. Il fit un quart de tour vers sa droite, mais rien ne changea, si ce n’est qu’il était désormais totalement face à moi, il s’opposait le pauvre… Sa taille ne me faisait pas peur, son prognathisme non plus…. je n’avais pas cligné des paupières depuis plus de trente secondes. Maladroitement il fit acte de s’intéresser à quelque chose de virtuel, sur sa droite, mais je ne le quittais pas des yeux et ma haine montait, elle était passée d’épidermique à pré-consulvive, je sentais mon adrénaline imprégné mes cellules corporelles, mon coeur battre sourdement, mon ventre se gonfler pour absorber toutes les ondes de stress environnantes… Il exhiba son gros dard, mais rien ne me fit baisser les yeux… je me préparais à passer à l’action. Je fus pris d’une crise de mon syndrome de Gilles de la Tourette, mais mes yeux ne le quittèrent pas et plus il s’immobilisait plus je me sentais près à agir, je conclus ma crise par un « fils de pute de ta mère mal léchée », je me sentis presque apaisé. Mes muscles saillis, ma main paume ouverte, j’allais le frapper.Il me fallait encore deux secondes, une pour me remémorer la scène d’apocalypse now, avec la bande sonore, quand les hélicoptères arrivent, l’autre, une scène du Napoléon de Fritz lang… je ne sais toujours pas pourquoi… Je ne ressentais plus de haine, je n’étais plus qu’une machine à tuer compulsionnelle. J’écrasai ce frelon d’un revers de la main droite… il eut le temps de me piquer ce connard.