Aux côtés de Jarie, Moseph apprenait et oubliait. Il apprenait à aimer cette terre qui jour après jour lui donnait ce qui le nourrissait, son blé, son pain, son fenouil, et pourquoi pas me direz-vous. Il oubliait qui il avait été, il oubliait l' »ab nihili » déformant de son visage qui lui retirait tout sens d’existence plausible aux yeux du reste de ceux qui déjà existaient de moins en moins. Exister pensait-il , mais ne le prononçait point. Il ne parlait toujours pas, mais , cérébralisait plus qu’il ne le fallait. Son silence était à la hauteur de ses yeux quand il réfléchissait….on savait qu’il y avait du sens à cette existence. Jarie perdait son regard dans la force des yeux de Moseph, celui-ci bousculait sa vie pour sentir la vitalité des yeux de cette femme.Tout entre eux était question de silence et d’échanges visuels…. le temps était passé, elle était jeune femme, il était jeune homme. El Hoim arriva jusqu’à eux un matin, alors que Moseph était au champ et que Jarie peignait un bateau, grand, isolé, sur une étendue d’eau gigantesque….Il prit la parole en ce sens:
_ »Toi l’homme , toi la femme… venez à moi et écoutez…Copulez plus qu’il ne le faut, remplis lui le ventre de ta semence, écarte tes cuisses et accueille le tant qu’il le voudra…. »
Il ne put finir sa phrase, Moseph avait frappé le sol de sa fourche avec laquelle il retournait sa terre depuis le matin, El Hoim , vieil homme parmi les hommes était silencieux, il reprit
_ » Il doit en être ainsi, car la fin ne saurait être….vous êtes les derniers. »
Il tendit à Moseph un parchemin sur lequel était inscrit des signes incompréhensibles.
_ » garde-le, bientôt tu comprendras. »
Il partit , d’un pas vif et alerte. Moseph se retourna vers Jarie , elle était à terre sa jupe relevée:
_ »viens… »